Une expérience commune à tous les lecteurs est notre entourage nous qualifiant d’être très intelligent. (Ou qu’on est boring, mais joke’s on them, un monde fictif est 100% meilleur que la réalité). Et si vous annotez vos livres, les gens sont persuadés que vous écrivez un essai en quatre parties sur la signification du rideau bleu dans Madame Bovary. On sait très bien, entre nous, que vous commentez la scène de smut entre vos personnages préférés (don’t lie). Cette fois-ci, mes annotations ressemblaient davantage à un essai sur la place de la femme dans le monde du travail et les inégalités qu’il revêt.

Avec une couverture et un synopsis pareil, j’étais déjà conquise par Lessons in Chemistry de Bonnie Garmus. Si je m’attendais à un livre de fiction littéraire attaquant les problèmes féminins dans la société, j’ai été choquée de voir à quel point ce livre m’a enragé jusqu’à avoir la fumée qui me sort des oreilles et m’obliger à prendre quelques secondes pour soupirer cette rage. Ayant également un faible pour les romans historiques, c’était dans la poche (et dans mon panier).

Synopsis

En tant que femme dans le domaine scientifique, la vie est dure pour la chimiste Elizabeth Zott. Les femmes se méfient d’elle, ne la comprennent pas ou en sont jalouses. Les hommes la sous-estiment, la rabaissent et en sont jaloux. Mais pire que sa carrière, ce que les gens reprochent à Elizabeth est son statut de célibataire et son enfant conçu hors mariage. Inévitablement, ces deux choses finissent par lui coûter son emploi à la Hastings Research Institute. Elle se voit obligé d’entreprendre un projet tout à fait contraire à ses principes : devenir animatrice d’une émission de cuisine pour les mères de famille. Mais Elizabeth a plus d’un tour dans son sac. L’opportunité est parfaite pour enseigner beaucoup plus que la cuisine à ces femmes partout à travers le pays.

Vous n’êtes pas prêts pour ce qui s’en vient

Je ne tenterai même pas de cacher mon appréciation : j’ai ADORÉ ce livre. J’ai ri et pleuré, j’ai été en colère ou excessivement frustrée, mais aussi totalement en amour par moment. J’ai été choquée, bouleversée, je me suis remise en question. Bonnie Garmus nous fait vivre la dure réalité de la femme au travail qui doit subir les inégalités jour après jour et se voit contraindre de garder le silence. Bref, ça a été une montagne russe d’émotions à laquelle je ne m’attendais pas du tout. J’en étais à peine au deuxième ou troisième chapitre que j’avais déjà écrit « j’ai vraiment le feeling que ça va être un 5 stars ». Spoiler much.

« Funny, isn’t it? A man writes a book about things of which he has absolutely no first-hand knowledge – childbirth and it’s aftermath, I mean – and yet: boom. Bestseller. My suspicion? His wife wrote the whole thing, then put his name on it. A man’s name gives it more authority, don’t you think? » (144)

Si on décortique cette merveille, on retrouve d’abord un style d’écriture ingénieux et réfléchi qui parle par expérience. L’autrice, Bonnie Garmus, dit s’être inspirée de sa mère dans son rôle de mère durant les années 1950-1960, illustrant les difficultés toujours d’actualité liées à cette position. Le choix de l’époque fait ressortir la complexité de balancer une carrière et une vie familiale pour les mères. Leurs choix sont sans cesse stigmatisés. Outre le personnage fictif de Elizabeth Zott, des millions de femmes vivent au quotidien en recevant ce jugement encore aujourd’hui et ne sont tout simplement pas prises au sérieux dans leurs démarches, rendant leur expérience ardue et inéquitablement frustrante. Le style d’écriture cru et matter-of-factly convie parfaitement le sentiment d’impuissance et de frustration partagé par tant de femmes.

Une critique de la société telle qu’elle est pleinement, c’est-à-dire un défi pour la femme et les inégalités du travail.

Lessons in Chemistry encourage les femmes à réaliser leur plein potentiel et refuser d’être l’esclave de leur mari. Il ne faut pas se fondre dans le moule que les hommes leur ont créé et dans lequel elles se sont abandonnées, perdues dans une fausse identité entièrement construite pour elles, mais contre elles. Dans un certain sens, ce livre m’a rappelé le film Barbie. J’entendais dans ma tête What Was I Made For? de Billie Eilish en lisant les derniers chapitres, à voir comment une femme aussi forte de inspirante qu’Elizabeth Zott peut être rabaissée sans arrêt simplement à cause de son sexe.

Frustration, colère, haine, répugnance, injustice, impuissance, tristesse, désespoir, abandon… Voilà les émotions à travers lesquelles vous passerez en lisant cette histoire. Quand je dis que je n’ai jamais été aussi fâchée en lisant un livre, ce n’est pas une hyperbole. Bonnie Garmus attaque des problèmes de société misogynes et des personnages toxiques, égocentriques et lâches qui, malheureusement, réussissent pour la même raison que les autres échouent : leur sexe.

« She didn’t want children – she knew this about herself – but she also knew that plenty of other women did want children and a career. And what was wrong with that? Nothing. It was exactly what men got. » (14)

Que dire des personnages? Déjà, wow. Elizabeth est une vraie héroïne et un modèle pour toutes les jeunes filles, ne se laissant pas marcher sur les pieds et raisonnant avec logique. Elle prouve au monde que les femmes sont toute aussi capables, intelligentes et essentielles que les hommes. Elle prouve n’a pas peur de parler tout haut lorsque vient le temps de montrer son désaccord. Elizabeth est drôle, pleine de surprises et étrangement captivante. Sans rien lui enlever toutefois, la réelle vedette de Lessons in Chemistry est selon moi Six-Thirty, le chien d’Elizabeth. Ça peut paraître bizarre, mais avoir son point de vue tout au long de l’histoire est le meilleur concept ever. Je vous le garantis, lisez ce livre et vous tomberez en amour avec ce chien. (Quand il rencontre le bébé, omg)

J’en profite pour insérer ce que je considère comme l’un des plus beaux passages de Lessons in Chemistry, mais qui contient un petit spoiler (à lire à votre discrétion) :

« The truth was, she was afraid to get close to the coffin because she knew she would try to pry it open, climb in and bury herself with him, and that meant dealing with the people who would try to stop her, and she did not want to be stopped. Six-Thirty sensed her death wish, and because of it, had been on suicide watch all week. The only problem was, he wanted to die himself. » (99)

Ai-je besoin de m’étendre sur mon rating? Cinq étoiles. Voilà. Je recommande ce livre à toutes les femmes afin de les empower. Et je recommande ce livre à tous les hommes parce que fuck you (façon de parler, demeurons civils).

Un sans faute. Je crée une page Notion pour chacun des livres que je lis afin d’y recueillir mes premières impressions, les points forts/faibles, ce que j’apprécie et ce que je n’aime pas, etc.

Sans surprise, sur cette fameuse page Notion, la section réservée à ce que je n’aime pas est entièrement vide. Blank. Rien à dire. La critique est exquise. L’autrice a ce don pour nous transmettre la frustration de la femme, dans son travail comme dans le privé, et dénonce les inégalités persistantes encore aujourd’hui. J’ai littéralement TOUT aimé de ce livre.

Note finale : 5/5

Oui, oui, ça arrive de faire exploser le baromètre. (Pour une autre suggestion qui borderline les six étoiles, rendez-vous ici!)

J’ai appris tout récemment que Lessons in Chemistry a été adapté en série télévisée dont la première est, roulement de tambour… Le 13 octobre 2023! Eh oui, vous pouvez dès aujourd’hui visionner la série sur AppleTV. C’est cadeau 😉

Laissez-moi savoir ce que vous avez pensé de Lessons in Chemistry si vous l’avez lu, ou encore dites-moi si je vous ai convaincu de le faire. Bonne lecture!